Le naufrage d’un bateau, dans lequel 800 personnes sont mortes, dans le trajet entre la Libye et l’Italie a mis en évidence l’actualité du drame quotidien vécu à la Méditerranée. Ce sont déjà plus de 1.600 morts depuis le début de l’année, aux portes d’une Europe dont l’unique réponse c’est lever des murs, des palissades, des fosses et «blinder» ses frontières avec des policiers, des militaires, des patrouilleurs, des expulsions et des lois d’etrangérie.
La Méditerranée est devenu la frontière la plus inégale du monde et aussi la plus dangereuse entre des pays qui ne sont pas en guerre. La seule guerre est celle qui se livre contre les jeunes, les travailleurs, les familles qui fuient de la violence, de la persécution ou de la misère. Il suffit de voir les données de Frontex, l’agence européenne de vigilance de frontières, pour comprendre la nature politique de ces fluxes. La majorité des naufragés sont des syriens qui fuient des barils-bombe et des armes chimiques du régime de Bashar Al-Assad et les jihadistes. Ensuite les érythréens, fugitifs d’une dictature atroce qui a récemment imposé un service militaire obligatoire indéfini pour les hommes et les femmes, dont l’inaccomplissement est puni par la peine de mort. Après des somaliens et des nigérians, réfugiés aussi des situations de violence extrême. Et tous ceux-là se trouvent, dans le chemin de l’immigration, avec des jeunes du Sénégal ou de la Gambie, qui essaient d’arriver à l’Europe simplement pour gagner leur vie, comme aujourd’hui beaucoup de jeunes de l’état espagnol qui émigrent à l’Allemagne. Et aussi les dites réfugiés climatiques, comme ceux qui fuient de la famine et la sécheresse en Éthiopie sous-saharienne et d’autres pays de l’Afrique.
Face à ces réalités brutales, les gouvernements européens et l’UE en faisent tout un plat sous le prétexte fallacieux d’ «ici Il n’y a pas de place pour tous». Comment s’il s’agissait d’une avalanche, quand ils sont quelques centaines de milliers pour tout un continent. Tres peut en comparaison aux millions de syriens installés sur des camps de réfugiés précaires dans les pays voisins. L’Europe « démocratique » ne donne pas de visas aux demandeurs d’asile: la seule alternative est de risquer leur vie dans un bateau qui les porte jusqu’à la frontière de la forteresse européenne. Ceux qui arrivent vivants ne peuvent pas demander protection parce qu’ils se trouvent avec les lois d’etrangerie et avec la déportation automatique à n’importe quel pays du nord de l’Afrique suffisamment soudoyé pour jouer le rôle de police des frontières européennes.
La seule réponse de l’UE face au drame est sécuritaire: militariser la Méditerranée pour arrêter les gens. Le premier ministre britannique, David Cameron, et le ministre des affaires étrangères espagnol, José Manuel García Margallo, ont affirmé qu’il ne faut pas mettre en place un grand dispositif de sauvetage, parce qu’il farait un «effet d’appel». Comme si les gens viennent en Europe par une décision libre, comme s’il s’agissait d’un sport d’aventure? S’ils se noient il y aura moins d’immigrés? De grands arguments pour armer l’extrême droite. La même qu’en Italie, il y a quelque jours, elle se lamentait de l’absence de Khadafi (celui qui a financé les campagnes électorales de Berlusconi et de Sarkozy) pour protéger l’Europe de l’immigration.
Le plus pervers est que les discours des gouvernements européens criminalisent les victimes. Au fond, ils nous disent que les damnés de la mer sont les coupables: ils devraient rester dans leurs pays et mourir là-bas. Mais ces gouvernements sont responsables des désastres en Irak, eb Syrie et encore plus en Libye (et avant en Afghanistan, une autre grande source de réfugiés) et aussi de la misère en Afrique. On ne peut pas dévaster la planète et espérer ne pas être touché par les conséquences.
Remplir la Méditerranée des patrouilleurs, des hélicoptères et des balises ne va pas arreter les damnés de la mer: ça va seulement faire leur voyage plus long … et plus meurtier. Parce que comme affirme un proverbe espagnol «on ne peut pas mettre de portes au champ ». C’est la fermeture des frontières terrestres ce qui fait que les gens se lancent à la mer. «Si vous ne voulez pas de morts, mettez un ferry-boat entre Tripoli et Rome», disait une pancarte dans la protestation des voisins de Lampedusa, une île avec 6.000 habitants qu’ont mobilisé toute la solidarité pour secourir les naufragés.
Pour l’UE il s’agit de construire simplement une forteresse, de lever des murs, d’aborder l’immigration comme un problème d’ordre public. Maintenant, ils annoncent une guerre contre les trafiquants, et menacent d’envoyer les armées pour attaquer les bateaux. En réalité, quand les portes d’entrée à L’Europe deviennent plus petites et plus dangereuses, les trafiquants de personnes font son beurre avec ceux qui n’ont pas le choix. Chaque mur qui se lève en Europe ouvre une nouvelle business pour les maffias, qui profitent du désespoir. Son «marché» est inépuisable. La meilleure manière de lutter contre les trafiquants ne sont pas les bombes: il faut finir avec le business de trafiquants, il faut d’ouvrir les portes à l’entrée légale des réfugiés et finir avec le traité de Schengen et les lois d’étrangerie, il faut mettre fin au spoliation, il faut de cesser de soutenir et d’armer les tyrans.
Comme même, il faut que l’Europe cesse de se remplir la bouche en donnant leçons de démocratie au monde entier. Quelle hypocrisie! Les portes principales d’entrée en Europe des «sans-papiers» sont les aéroports. L’Europe est un continent vieux et riche, entouré d’un monde jeune et appauvri. Et, malgré la crise, a toujours besoin des jeunes travailleurs sans aucun droit pour qu’ils deviennent chair à canon de la surexploitation. Toute une armée de sous-prolétariat : les esclaves du XXIe siècle. Ils ne veulent pas qu’au lieu d’une menace nous les voyons comme ceux qu’ils sont en verité: nos frères de classe, les victimes des mêmes intérêts qui attaquent nos droits et notre avenir.
Cristina Mas. Lucha Internacionalista