L’épidémie de coronavirus, qui a son épicentre en Chine, a eu un impact mondial en raison de sa gravité en termes de pertes de vies humaines. Mais aussi en raison des conséquences économiques qu’elle aura pour les masses du monde. La Chine est semi-paralysée. Le commerce mondial sera affecté et la production continuera à baisser. Les multinationales voudront faire payer ce coût aux populations du monde entier. La crise du coronavirus montre également la réalité sociale de la Chine et la dictature du Parti communiste chinois (PC). Le régime a censuré les premiers avertissements d’un médecin et l’a accusé de «perturber gravement l’ordre social». Des semaines plus tard, il est mort infecté par le virus. Cela a retardé la réponse à l’épidémie. Ni le capitalisme chinois ni le système capitaliste-impérialiste mondial ne garantissent une réponse adéquate à cette crise humanitaire qui touche des millions de personnes.
Ce mois-ci, il a été rendu public que l’épidémie de coronavirus a commencé dans la ville de Wuhan en décembre, mais ce n’est qu’en janvier que les autorités gouvernementales chinoises l’ont reconnu. La ville de Wuhan compte 11 millions d’habitants et c’est la capitale de la province du Hubei. C’est la plus grande quarantaine de l’histoire qui se heurte à cette situation, car l’Hubei compte 56 millions d’habitants.
Jusqu’à présent, l’épidémie n’a pas cessé et a déjà dépassé les 1.400 décès en Chine, selon les chiffres officiels du régime. La moyenne de 100 décès par jour le mardi 11 février est passée à 242 le mercredi 12 février. À ce jour, les autorités parlent de plus de 64.000 personnes touchées. Il n’existe toujours pas de vaccin. Avec un épicentre en Chine, elle s’est étendue à l’Asie et à certains pays d’Europe.
La gravité de l’épidémie, bien qu’en nombre elle puisse encore paraître faible, est qu’elle a déjà dépassé les décès de la précédente épidémie de SARS (2003) dans le pays. Il peut sembler simple de dire que cette épidémie est due au capitalisme chinois. Mais le fait est que le capitalisme, qui provoque une misère croissante, a créé les conditions pour l’émergence de ces nouvelles épidémies et pour les aggraver.
Les causes de l’émergence et du développement de ce type de maladies en Chine, telles que le SARS, la grippe aviaire et maintenant le coronavirus, doivent être recherchées dans la crise sociale qui s’est développée dans ce pays depuis le retour au capitalisme.
Sur la base des données connues sur les origines possibles du coronavirus, on peut soupçonner qu’il a fait son apparition dans les marchés publics très fréquentés de Wuhan, où sont vendus des animaux vivants : des poulets et des porcs jusqu’à d’autres oiseaux et reptiles, qui sont souvent abattus au moment de l’achat. Des renards, des chauves-souris et des serpents sont également vendus. On pense que certains de ces animaux pourraient avoir transmis le virus. Le gouvernement chinois a cherché à justifier ces pratiques, totalement malsaines et interdites dans de nombreuses régions du monde, en les présentant comme une question «culturelle» ancestrale. Alors qu’en réalité, ce type de marché, qui se produit en Chine et dans d’autres parties du monde, est le résultat de la misère et de l’inégalité des peuples. Une tradition issue des misères et des famines générées par l’exploitation capitaliste.
L’émergence et l’aggravation de cette épidémie montrent le vrai visage de la Chine capitaliste d’aujourd’hui, que l’impérialisme et les médias bourgeois ont salué comme un exemple de la «modernité» du capitalisme. Pour leur part, la majorité de la gauche et du centre-gauche du monde, parmi lesquels le chavisme, le lulisme ou le castrisme, en font l’éloge et affirment qu’il s’agit d’un exemple d’un supposé «socialisme de marché du XXIe siècle». Alors qu’en réalité, les contradictions que connaît aujourd’hui la Chine capitaliste et ses énormes inégalités sociales sont mises à nu, avec quelque 400 millions de riches et de membres de la classe moyenne supérieure, contre plus d’un milliard de travailleurs, de femmes et de paysans qui vivent exploités, surpeuplés et dans des conditions misérables.
L’épidémie du coronavirus se produit également dans le contexte d’une détérioration du système de santé chinois due aux privatisations qui ont eu lieu dans le feu de la restauration à la fin des années 1980 et 1990. Avec la révolution de 1949, le système a été étatisé et est devenu gratuit. Depuis la restauration capitaliste, «le 45% de la population urbaine du pays et le 80 % de la population chinoise n’ont aucun genre d’assurance maladie, ce qu’a récemment admis le vice-ministre de la Santé Gao Qiang» (Andrés Oppenheimer, Cuentos Chinos, page 61, Editorial Sudamericana. 2005).
Le gouvernement chinois et les médias ont voulu montrer «une certaine efficacité», en annonçant qu’un hôpital avait été installé en 10 jours. Alors que ce n’était qu’une improvisation désespérée visant à contrecarrer la détérioration de la santé publique qui est dénoncée clandestinement en Chine.
Le médecin qui a alerté et a été censuré meurt du virus
La gravité de l’épidémie du coronavirus est aussi mise en évidence par la répression et la censure de la dictature du PCC. C’est pourquoi les données sur les décès et les infections sont très douteuses. La seule source d’information est la dictature chinoise qui ment. Mais de plus en plus de dénonciations et de protestations se répandent via les réseaux sociaux.
Le point culminant qui a déclenché la croissance des protestations du peuple chinois c’est le cas de la censure et de la répression de l’ophtalmologue Li Wenliang. Déjà en décembre, ce médecin de 34 ans, qui travaillait à l’hôpital de Wuhan, a été le premier à alerter au sujet de la présence et de l’agressivité du virus, et il a commencé à envoyer des messages à ses collègues pour les avertir de la gravité et des dangers que ce virus provoquait. Le 30 décembre il y a eu le premier signalement qui n’a pas été pris en compte. Pour aggraver les choses, quelques jours après que l’alerte précoce ait commencé à être connue, des fonctionnaires du bureau de la sécurité publique (police) se sont présentés chez lui pour prévenir ce médecin qu’il était en train de «commettre un délit grave». Ils l’ont forcé à signer une note dans laquelle ils l’accusaient de faire des «faux commentaires» et de «troubler gravement l’ordre social» (Clarín, Argentine 7/02/20). Malheureusement, le médecin avait déjà contracté le virus et a fini par mourir à la mi-janvier, ce qui a eu un impact énorme. Aujourd’hui, il est considéré comme un héros national par le peuple chinois au fur et à mesure que son combat se faisait connaitre.
La dictature, en niant cet avertissement, a probablement empiré l’aggravation de l’épidémie. L’impact de ces événements a été tel que le gouvernement central a dû révoquer la direction du Parti communiste de la province du Hubei et de la ville de Wuha pour tenter de contenir la haine du peuple.
Le coronavirus et la négligence capitaliste mondiale
Non seulement l’action de la dictature chinoise est répugnante. Cela fait partie de la négligence du système capitaliste-impérialiste mondial qui aggrave toute forme de réponse pour empêcher la propagation de l’épidémie et la perte de vies humaines dans le monde.
Il existe une lutte entre les différents pays capitalistes, et en particulier les multinationales pharmaceutiques et les laboratoires privés, pour être les premiers à découvrir un vaccin par leur propre compte et à détenir un brevet et obtenir des gros gains de la vente de ce produit. Par exemple, «le géant pharmaceutique britannique Glaxo Smith Kline (GSK) a déjà commencé à développer un projet. La course est rapide et le premier qui y arrive peut remporter le gros lot» (Clarín, Argentine, 5/02/20).
Cette lutte a atteint un tel point que le directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) lui-même, l’Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, a accusé «certains pays riches d’être très en retard dans le partage des informations sur les cas de coronavirus, appelant à une plus grande solidarité internationale pour lutter contre l’épidémie en Chine» (idem, 5/02/20). L’OMS a déjà estimé que, au minimum, elle ne peut donner un vaccin que dans un an et demi.
Au-delà du pic de la propagation de l’épidémie- et nous espérons que ce soit le moins possible-, il y aura une aggravation de la crise économique capitaliste actuelle. La Chine géante est semi-paralysée. Le commerce mondial sera affecté et la production continuera de baisser. Les multinationales vont vouloir faire payer ce coût aux populations du monde entier. Le peuple doit être prêt à continuer à les affronter.
Miguel Sorans
Membre de la direction d’Izquierda Socialista (Argentine) et de l’Unité internationale des Travailleurs et des Travailleuses (UIT-QI).
14 février 2020